Utilisation de Préparations Riches en Facteurs de Croissance (PRGF, PRP) dans l’appareil locomoteur

Par le Docteur Marc Bouvard – 17 septembre 2010

En traumatologie du sport, certaines lésions, de par leur siège, leur nature ou leur taille, constituent un difficile challenge pour le thérapeute. L’évolution de ces lésions peut dépasser 6 mois et conduire à un traitement chirurgical. On peut notamment citer les tendinopathies rebelles au traitement classique, les ruptures partielles de tendon, certaines lésions musculaires graves.

Depuis une décennie, les recherches en biologie tissulaire ont créé de nouvelles opportunités concernant la réparation et la régénération des tissus lésés. Les chirurgiens reconstructeurs de la face ont été les premiers utilisateurs de préparations riches en facteurs de croissance (PRGF). Les chirurgiens-dentistes en ont à présent un usage courant à leur cabinet, notamment pour faciliter la mise en place des implants dentaires. De nombreuses équipes comprenant des biologistes et des chirurgiens ont appliqué cette technique aux tissus de l’appareil locomoteur afin d’accélérer la formation d’un tissu de cicatrisation et d’en améliorer la qualité biologique et mécanique. Le processus de réparation des tissus est une cascade complexe d’évènements biologiques contrôlés par un grand nombre de facteurs de croissance et de cytokines intervenant dans la multiplication cellulaire, la genèse des vaisseaux et l’inflammation qui jouent un rôle dans la régénération et la cicatrisation des tissus. Les facteurs de croissance sont notamment très concentrés dans les plaquettes sanguines. Ces plaquettes dont le rôle dans l’hémostase est bien connu, participent aussi de façon importante à la réparation des tissus. Afin d’optimiser l’effet des facteurs de croissance, il convient de restreindre dans toute la mesure du possible la présence de globules rouges et blancs dans les préparations car il joue un rôle délétère dans les processus de cicatrisation.

A présent, l’état des connaissances de cette technique, le recul de plusieurs années dans de nombreuses équipes, doit nous inciter à amener ce traitement à la portée des patients et à inclure l’utilisation des PRGF dans nos stratégies de médecine et chirurgie du sport.

Les préparations riches en facteurs de croissance sont obtenues à partir d’une prise de sang prélevé sur le patient à jeun. Il s’agit donc d’un traitement totalement autologue (autotraitement). La séquence prélèvement – préparation-injection est réalisée en un seul temps sans stockage ou conservation du plasma. Une fois préparé, le PRGF peut être utilisé dans et autour d’une lésion mais il peut aussi être incorporé à une greffe osseuse ou une plastie ligamentaire en créant un biomatériau qui combine les objectifs anatomiques mais aussi biologiques du tissu cible.

Les lésions tendineuses sont quelquefois très rebelles au traitement médical bien conduit. Le tissu tendineux possède une mauvaise capacité de réparation par pauvreté en cellules et en vaisseaux de ce tissu. Il est démontré que l’injection intratendineuse de PRGF augmente la densité cellulaire et la vascularisation sans fabrication de fibrose ou d’autres effets secondaires. Le PRGF augmente également l’expression du gène régulateur du collagène. Dans les tendinopathies en échec du traitement médical, l’injection de PRGF guidée par l’échographie au sein de la lésion et dans le tendon sain avoisinant donne des résultats cliniques encourageant en réduisant les douleurs et améliorant les capacités fonctionnelles.

Les injections de PRGF peuvent aussi être utilisées dans les ruptures partielles ou totales d’un tendon, accompagnant un geste chirurgical. Elles diminuent la période de récupération fonctionnelle de façon significative.

De la même façon le PRGF peut être utilisé pour accompagner une plastie du ligament croisé antérieur par injection dans le greffon avant sa pose et injection du tunnel fémoral et tibial après fixation. Le PRGF fournit alors au greffon des signaux biologiques qui vont l’aider à sa transformation en tissu fonctionnel. Le PRGF va également aider à l’invasion vasculaire précoce, facteur déterminant de l’intégration et du remaniement des greffes.

Dans les lésions musculaires, l’utilisation des PRGF doit être précoce. Sous contrôle échographique, l’hématome est ponctionné et remplacé par du PRGF afin d’obtenir dans le foyer lésionnel une concentration supraphysiologique de facteurs de croissance. L’objectif est d’obtenir la formation d’un tissu de cicatrisation plus rapide et de meilleure qualité. La technique s’adresse notamment aux lésions graves de grande taille ainsi qu’aux sièges lésionnels connus pour leur mauvais pronostic et la longueur de leur convalescence (droit fémoral et ischio-jambier hauts, biceps fémoral bas, désinsertion du jumeau interne).

Plus récemment, des équipes utilisent avec des résultats encourageants les PRGF dans les pathologies du cartilage sous la forme de trois injections à une semaine d’intervalle. L’indication parait intéressante dans les échecs de la viscosuplémentation, les lésions récentes non chirurgicales, les lésions ayant fait l’objet d’une greffe ou de microfractures.

L’utilisation des PRGF doit bénéficier d’une poursuite des études cliniques afin de mieux cerner les indications potentielles dans l’appareil locomoteur. Les processus biologiques vont s’améliorer, permettant d’optimiser les préparations autologues en tenant compte des composantes spécifiques de chacun des tissus et des situations cliniques propres.